De tous les microbes, ce sont les virus qui colonisent en masse notre planète. Ils se trouvent dans l’eau, les sols ou encore dans les airs. Leur propagation c’est ce qui préoccupe actuellement le monde scientifique, comment la Covid-19 se propage-t-il ? Peut-il se propager dans l’air ? Nos systèmes de ventilation sont-ils liés à cette propagation ?
C’est dans le but d’éclairer ces questionnements que nous avons fait appel au Professeur Daniel Camus, de l’Institut Pasteur de Lille, que nous remercions. Spécialiste de la parasitologie-mycologie et de l’infectiologie et membre du Haut Conseil de la santé publique.
Nous savons aujourd’hui que la qualité de l’air et plus particulièrement les polluants peuvent altérer nos capacités pulmonaires et augmenter le risque de développer des pathologies graves. De ce fait, il apparaît bien que « la pollution de l’air soit un facteur d’aggravation facilitant l’entrée du virus dans les poumons. Toutefois, il n’existe pas, à l’heure actuelle, de preuves probantes et scientifiques permettant d’indiquer que le risque de contamination par le virus Covid-19 est augmenté ou non par des expositions répétées à la pollution » comme nous l’explique le Pr Daniel Camus.
À proprement parler la réponse est OUI, un virus peut être transporté par gouttelettes ou aérosols quel qu’il soit. En effet un aérosol est composé d’un ensemble de particules fines en suspension dans l’air. Ces particules fines peuvent contenir aussi bien des virus, des allergènes, des hydrocarbures et même des métaux lourds.
Cependant, comme nous l’indique le Professeur Daniel Camus concernant le Covid-19 « l’élément essentiel à prendre en compte concerne la charge virale du virus » ou densité virale du virus. La charge virale correspond à la quantité de copie du virus comprise dans un élément transportant le virus. Ce vecteur de transport peut être aussi bien un aérosol se dispersant dans l’air ou même un fluide comme des gouttelettes projetées lorsque l’on éternue ou parle.
Ainsi, il faut bien comprendre que « la charge virale du virus est beaucoup plus importante dans les gouttelettes que dans les aérosols ». L’ensemble des mesures de distanciations sociales, de gestes barrières et de ports de masques vont dans ce sens pour limiter la propagation du virus. La question se pose donc sur la charge virale du virus sous forme d’aérosol dans l’air, est-elle suffisante pour le rendre infectieux ?
Dans l’air, le virus sous forme d’aérosol et de particules virales va se dessécher progressivement, sa charge virale diminue rapidement dans le temps et dans l’espace jusqu’à ce que le virus s’auto détruise. Il est donc nécessaire de bien faire la distinction entre la charge virale du virus dans un air intérieur souvent confiné par rapport à l’air extérieur.
Il faut savoir que « le virus Covid-19 se développe peu dans les systèmes de ventilation car il a besoin d’une cellule pour pouvoir se multiplier », ainsi dans les tubes de ventilation, les particules virales vont se déposer, s’assécher et s’auto-détruire. Contrairement aux bactéries comme les légionelles qui peuvent se développer plus facilement dans les conduits de ventilation.
Concernant les systèmes de ventilation centralisés utilisant des filtres HEPA soit des filtres à air à Haute efficacité, ces filtres permettent bien de limiter la diffusion du virus puisque ce type de filtre bloque les polluants biologiques et particules transportés dans l’air. Il convient donc ici de bien comprendre « la nécessité de toujours faire vérifier et entretenir ses systèmes de ventilation afin de bien garantir leur efficacité. »
Pour les systèmes de ventilation amenant de l’air directement de l’extérieur vers l’intérieur, il n’y a pas de risque avéré. Comme nous avons pu le décrire dans la précédente question, l’air extérieur n’est pas, de manière importante, un vecteur infectieux du virus Covid-19.
Quant aux recommandations relatives aux installations de chauffage, de ventilation, de climatisation et de réfrigération dans le cadre du virus Covid-19 réalisées par UNICLIMA. Se basant sur les informations de REHVA et de l’AICVF, ils indiquent bien « qu’à ce jour, il n’y a pas de contre-indication au maintien en fonctionnement des systèmes de renouvellement d’air ou de ventilation. Au contraire, le maintien en fonctionnement des systèmes pendant les épisodes épidémiques contribue à limiter le risque de confinement du virus par l’apport d’air neuf et le renouvellement d’air dans les locaux. De façon générale, les systèmes de ventilation ou de traitement d’air permettent d’assurer un renouvellement d’air dans les bâtiments. »
« Il est a remarqué que depuis plusieurs années, l’utilisation de gels hydroalcoolique est en constante augmentation et que cela était déjà une habitude dans certains foyers » d’après le Pr Daniel Camus. Cependant la situation actuelle a permis de faire prendre conscience à un grand nombre d’entre nous qu’un ennemi invisible pouvait mettre à l’arrêt la planète entière et causer de graves dégâts sanitaires. Nous devons donc apprendre à vivre avec la présence du virus en modifiant nos comportements et en étant responsables de nos environnements. Les termes d’hygiène et de propreté sont au cœur de ses changements au-delà du principe de distanciation sociale qui reste une des mesures les plus efficaces pour limiter la propagation du virus Covid-19.
La connaissance et la maîtrise de la qualité de l’air intérieur en est une composante essentielle puisque sans forcément sans rendre compte chacune de nos actions impacte l’air que nous respirons. Les polluants, tout autant invisibles qu’un virus comme celui du virus Covid-19, peuvent impacter négativement notre santé et même si le risque sanitaire est moins brutal et rapide qu’un virus, ils restent tout au moins, et même, voire plus mortels sur de plus longues périodes. Tout comme les gestes barrières, des bonnes pratiques doivent devenir des automatismes pour maîtriser sa qualité de l’air intérieur. Comme l’énonce le Pr Daniel Camus, « l’entretien et le nettoyage régulier des systèmes de ventilation doit devenir et rester une priorité pour garantir un environnement sain »
Le lien entre la qualité de l’air et le virus Covid-19 est fortement associé avec les notions de charge virale, de distance de propagation et de dilution dans l’air.
Il faut aussi bien retenir qu’aujourd’hui il y a encore peu de recul sur des études scientifiques ou expériences sur ce virus que les chercheurs apprennent encore à connaitre.
Institut Pasteur de Lille : L’Institut Pasteur de Lille est une fondation privée reconnue d’utilité publique dédiée à la recherche fondamentale, à la prévention, la santé publique et à la formation dans ses domaines de compétence. Avec ses six unités mixtes de recherche, son centre d’examens, son service nutrition et son centre international de vaccination, l’Institut Pasteur de Lille contribue à l’amélioration de la santé et de la qualité de vie. Les équipes de l’Institut Pasteur de Lille, grâce au soutien de partenaires et donateurs, sont engagées dans la lutte contre les maladies cardiovasculaires ou neurodégénératives, les maladies inflammatoires, infectieuses ou parasitaires, les maladies métaboliques ou encore les cancers. Dans le cadre du Covid-19, une équipe de recherche dédiée "Task Force" réunissant des chercheurs de plusieurs laboratoires de l’Institut Pasteur de Lille est pleinement mobilisée dans la recherche d'un traitement contre ce virus Covid-19 avec trois objectifs stratégiques :
Professeur Daniel CAMUS : Membre de la Commission du Haut Conseil de la Santé Publique spécialisée des maladies infectieuses et maladies émergentes. Daniel Camus est professeur à l’université de Lille 2, médecin au Centre de prévention et d’éducation pour la santé de l’Institut Pasteur de Lille qu’il a créé en 2003. Il a été membre du groupe de travail « Global Action Plan » au sein de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et vice-président du Comité des maladies liées aux voyages et des maladies d’importation (CMVI) du Haut Conseil de la Santé Publique jusqu’en 2017. Il est un spécialiste de la parasitologie-mycologie et de l’infectiologie. Ses travaux de recherche ont conduit à de nombreuses publications, traitant notamment des relations hôte-agent infectieux, du diagnostic, de la thérapeutique, de la prévention et de la vaccinologie des maladies infectieuses et parasitaires. De 2007 à 2010, il a été en charge, au niveau du ministère de la Santé, de la prévention et de la gestion des risques infectieux et, au moment de la pandémie H1N1, conseiller spécial du directeur général de la santé.
UNICLIMA : Créé en 2009, Uniclima est l'union de syndicats historiques (le Syndicat du matériel frigorifique, le GFCC : groupement des fabricants du chauffage central et le syndicat de l'aéraulique) dans le secteur des industries thermiques, aérauliques et frigorifiques. Uniclima compte 86 sociétés ou groupes leaders sur leurs marchés ce qui fait du syndicat le représentant légitime de la profession.
REHVA : Federation of European Heating, Ventilation and Air Conditioning fondée en 1963 est une organisation qui représente plus de 120 000 concepteurs, ingénieurs, techniciens et experts en chauffage, ventilation et climatisation dans 27 pays européens. REHVA offre à ses membres une plate-forme solide pour la mise en réseau professionnelle internationale et l'échange de connaissances dans le but d'améliorer la santé, le confort, la sécurité et l'efficacité énergétique dans les bâtiments. REHVA contribue au développement technique et professionnel, suit l'évolution des politiques européennes et représente les intérêts de ses membres au niveau européen et mondial.
AICVF : L’AICVF est une association qui contribue au développement scientifique, technique et technologique des industries du chauffage, de la ventilation, du conditionnement d’air, du froid et de la régulation, ainsi que de leurs branches connexes qui concourent, dans le respect de l’environnement, à la maîtrise des éco-climats , et à l’accroissement de la performance énergétique des bâtiments. Elle assure aussi l’information, la formation et le perfectionnement de ses membres et des acteurs du secteur.